En tant que céramiste, plusieurs choix s’offrent à toi. Tu peux décider d’ouvrir ta boutique pour y vendre tes pièces, travailler avec des revendeurs, ouvrir une boutique en ligne ou encore faire de la vaiselle pour des restaurants. Cette dernière option sera le sujet de notre article du jour qui s’appuie sur un Café Poterie réalisé récemment. Pour cette émission nous avons échangé avec Marion Graux, Hortense Montarnal et Léa Guetta, 3 céramistes aguerries dans le travail avec les restaurateurs. Tu trouveras l’émission en fin d’article.
Aujourd’hui de plus en plus de chefs désirent avoir leur propre vaisselle personnalisée et artisanale. Les restaurants laissent tomber cette image traditionnelle des nappes et assiettes blanches pour des vaisselles plus atypiques et dans l’air du temps.
Travailler avec les restaurateurs est l ‘objectif de nombreux céramistes. Quand on souhaite se lancer dans cette voie, il y a plusieurs questions à ce poser : quelles sont les limites et les avantages de cette branche ? Comment réussir à cadrer les restaurateurs dans leur demande ? Comment rentabiliser son temps et tarifer ses pièces ?
Les limites et avantages du travail avec les restaurateurs
Les avantages
- Tu sais pour qui tu vas travailler, il n’y a pas de surprise. Tu es en relation directe avec ton client et donc avec ses attentes.
- Travailler dans cet univers t’offre la possibilité de rencontrer de grands chefs. Cela augmentera ta crédibilité et te permettra de créer de nouveaux contacts.
- Les commandes porteront sur des quantités importantes, c’est une manière d’être sur de rentabiliser ton temps de travail.
- Voir tes pièces dans le restaurant, observer comment elles s’adaptent à l’univers de ce dernier, te procureront une grande satisfaction.
Les limites
- Travailler pour des restaurateurs s’avère très intense. Cela demande une production de pièces importante et donc beaucoup de temps à y consacrer. En échange de sécurité, tu auras un travail plus répétitif.
- Les restaurateurs n’ont pas forcément la notion du temps qu’il faut pour créer une assiette, ils imposent souvent des dates limites difficiles à respecter. Il faut savoir gérer son stress et son temps afin d’être le plus efficace possible.
- Il faut absolument cadrer les attentes du client, bien communiquer, pour éviter de produire une série qui ne conviendra pas.
La prise de contact
Les céramistes invités de notre Café Poterie ont toutes acquise une notoriété qui leur permet « d’attendre les clients ». Mais si tu n’as pas encore cette chance, il va falloir trouver des pistes pour rentrer en contact avec les restaurateurs et leur proposer ton travail. Voici quelques idées :
- Te rendre directement dans les restaurants avec un support visuel pour donner une idée de ton travail : petit catalogue, photos, mini pièces ou au minimum ton instagram. Le contact direct peut faire peur mais il reste une excellente façon de vendre ton travail.
- Participer à des évènements liés à la gastronomie pour rentrer en contact avec de potentiels clients.
- Utilise les réseaux sociaux pour prendre contact. Évidemment, personnalise tes messages.
- Garde contact et crée des liens avec tes clients pour développer le bouche à oreille. Tu pourras peut être participer à des ouvertures de restaurants ou d’autres évènements qui regroupent les restaurateurs de ta région.
Cadrer les attentes des chefs
Lorsque tu travailles avec un restaurateur, tu peux tomber face à différentes personnalités. Certains vont avoir une idée claire et précise de ce qu’ils veulent voir sur leurs tables. Dans ce cas, à toi de bien évaluer le travail nécessaire pour les satisfaire. D’autres, au tempérament plus indécis, risquent de changer constamment d’avis, de te faire des demandes contradictoires, voir incohérentes d’un rendez-vous à l’autre ! C’est du vécu ! 🤭
Pour cadrer la demande des chefs et ne pas être débordé par des aller-retours incessants, il te faudra être ferme. Si tu as affaire à quelqu’un qui part dans tous les sens, propose un catalogue de formes et d’émaux. Si ce dernier ne leur convient pas, tu peux envisager une personnalisation mais essaie de rester dans un cadre et de valider les points les uns après les autres.
Prenons pour exemple Hortense Montarnal. Elle impose au maximum 4 formes et 4 émaux aux chefs, mais elle laisse quand même la porte ouverte aux personnalisations. Attention, Hortense nous rappelle que cela peut vite devenir ingérable !
Beaucoup se demandent aussi : doit-on proposer une série parfaitement identique ou « une série de pièces uniques » ? La réponse : à toi de voir. Tout dépend de tes habitudes, de ton univers. Dans le cadre du travail avec un restaurant, prend juste la précaution de valider ce point avec ton client avant de commencer à produire.
Rentabiliser son temps
Ne pas travailler à perte doit être ton objectif principal. Pour cela, cadre un maximum ton projet avec le restaurateur comme on l’a vu précédemment. Un projet bien défini te permettra de faire un devis précis et surtout rentable. On reparle du prix plus bas mais n’oublie pas qu’il doit inclure le travail de prototypage.
Pour rentabiliser le temps passé à la recherche de prototypes, tu as 3 possibilités :
- Inclure directement ce temps dans le prix de tes pièces.
- Facturer chaque prototype en fonction du temps que tu y as consacré.
- Créer des prototypes miniatures. C’est un conseil d’Hortense que je trouve très judicieux. Ces derniers permettent de gagner du temps et d’économiser la terre.
Faut-il exiger une quantité minimale pour travailler avec un restaurant ? Non, surtout si tu démarres, n’hésites pas à saisir l’occasion de te constituer une clientèle dans ce milieu.
Et dans le cas ou tu aurais sous-évalué ton devis, essaie de changer de méthode production (ex : passer au moulage) ou à demander l’aide d’un confrère pour avancer plus vite. S’obstiner dans une pratique non rentable risque de t’épuiser et de te décourager pour la suite.
Estimation du tarifs des pièces pour les professionnels
Léa Guetta et Marion Graux ont décidé d’appliquer une remise professionnelle de 30% par rapport à leur prix public. Mais libre choix à chaque céramiste d’appliquer ou non un prix professionnel. Tout dépend de ton prix de départ ! Pour calculer ton prix, tu peux consulter notre article sur la vente en boutique.
Tester ses pièces et ses émaux
Faire des pièces à but alimentaire nécessite une grande rigueur. Pour éviter tout problème il est très important que tu testes tes pièces avant de les livrer. Tu peux tester ton email à la maison en passant tes pièces au lave-vaisselle, en les laissant tremper dans du vinaigre ou tout simplement faire tester ton émail en laboratoire.
Sur ce sujet, nous avons aussi réalisé un Café Poterie très complet avec Joëlle Swannet, n’hésite pas à le regarder / écouter.
Un autre problème souvent rencontré dans la restauration : les traces de cuillère ou de couteau sur les assiettes notamment mattes. Il est difficile d’obtenir un émail matte qui ne marque pas, selon certains c’est même impossible ! C’est pour cela que je te conseille de les satiner plutôt que de les matifier. Tu peux aussi comme Léa le conseille, passer un coup de couteau sur tes pièces pour voir si elles marquent.
Les conseils de nos 3 céramistes
- Hortense : « La clé c’est : Essayer – Se tromper – Recommencer »
- Léa : « Il faut avoir les épaules, ne pas avoir peur de travailler beaucoup. Etre très rigoureux »
- Marion : « Etre très rigoureux sur l’apprentissage de base. Le temps donne la qualité au travail, il faut donc être patient »
Le Café Poterie : Céramistes & Restaurateurs
En conclusion, travailler avec les restaurateurs est une facette du métier de céramiste qui peut s’avérer passionnante mais qui cache certains pièges. A toi de t’y adapter ! Si vous avez envie de partager vos expériences dans ce domaine, n’hésitez pas à laisser un petit commentaire ! Merci !