La technique du Raku est réellement impressionnante et captivante. Nous manipulons des pièces incandescentes, la cuisson est rapide, les fours sont faciles à construire. Une technique accessible à tous. Toutes ces raisons font du Raku une technique plébiscitée mais qui suscite de nombreux questionnements. C’était justement le thème d’un cafés poterie, je t’invite à regarder la vidéo en complément de cet article !
Une brève histoire du Raku
Le Raku
Le mot Raku est abréviation du terme Raku-yaki. Il signifie plaisir ou joie. Contrairement à ce que nous pouvons croire, ce nom vient d’une lignée familiale japonaise et non d’une technique de cuisson.
Qu’est-ce que le Raku ?
Le Raku est une technique intimement liée à la cérémonie du thé waki-cha et à ses bols. A l’origine, elle représente des bols réalisés à la main, très simples, dépouillés, cuis dans des fours à bois puis trempés dans l’eau, incandescents. Aujourd’hui nous utilisons ce terme pour désigner une technique de cuisson. Cette cuisson est à basse température, aux environs de 1000°C. Elle est rapide. Elle se déroulait à l’origine dans un four à bois. Aujourd’hui, en Europe, nous utilisons surtout les fours à gaz.
L’ origine
Cette technique apparaît au XVIème siècle à Kyoto autour de deux personnages centraux: un maître du thé Sen no Rikyū et un potier Tanaka Chôjirô. A cette époque, des guerres avaient appauvries le pays, ce qui a poussé les céramistes à proposer des bols plus simples, moins onéreux pour continuer cette cérémonie du thé, plus simplement.
L’évolution du Raku
A l’origine, dans le Raku japonnais il n’y a pas d’enfumage. Les pièces sont sorties du four incandescentes, puis trempées directement dans l’eau. Le Raku tel que nous le pratiquons en Europe vient d’un céramiste américain, Paul Soldner. Il découvre le Raku dans le livre de Bernard Leach. Il a l’idée, en sortant les pièces de son four, de les tremper dans de la sciure et ainsi, de créer un enfumage. C’est ce que nous appelons le Raku occidental.
Le Raku
Alimentaire ou pas ?
Le Raku n’est pas alimentaire en France car les pièces sont poreuses avec un réseau de craquelures. Ces pièces étant poreuses, nous ne pouvons pas non plus les utiliser pour des vases.
Les différentes branches du Raku
- Le Raku traditionnel
C’est le Raku évoqué plus haut. Plus qu’une technique de cuisson, c’est une philosophie où la simplicité, l’irrégularité et le naturel sont fondamentaux. La pièce est cuite, puis plongée dans de l’eau pour limiter l’apport d’oxygène, arrêter la combustion, ce qui va engendrer ce réseau de craquelures.
- Le Raku occidental
il est notre interprétation du Raku traditionnel. Décliné à l’origine par Paul Soldner, il varie du Raku traditionnel par un enfumage dans de la sciure ou des copeaux. Un autre point différenciant est l’utilisation d’émaux à effets plutôt métalliques contrairement au Raku traditionnel, plus sobre.
- Le Raku Punk
Concept développé par Jean François Bourlard. Ce céramiste chauffe la pièce dans un petit four, la sort incandescente. Il la trempe ensuite dans l’émail, puis dans la terre ou dans l’engobe. L’idée est de se laisser une liberté totale d’expérimentation.
- Le Raku nu
Une extension du Raku occidental dans laquelle nous exploitons un défaut. C’est David Roberts qui a découvert cette voie lors d’une cuisson où l’engobe n’a pas tenu sur la pièce. Le principe est de partir d’une surface soignée et polie sur terre crue. Il faut faire une première cuisson de biscuit. Il faut ensuite passer un engobe réfractaire sur la pièce qui est préparé pour tenir le temps de la cuisson. On pose ensuite un émail par-dessus. La cuisson se passe comme pour le Raku occidental. Une fois la cuisson réalisée, on épluche l’engobe qui part avec l’émail. On obtient alors des variations de couleur entre les parties qui auront été émaillées ou pas. L’ émail agit comme un cache, et permet de garder des parties blanches. Cela crée un contraste avec les parties noires de la terre non protégée.
Les différentes étapes du Raku
La fabrication de la pièce
La fabrication d’une pièce se fait traditionnellement en modelage. Attention à ne pas la faire trop lourde et à lui laisser des jointures solides sinon elle pourrait se fissurer lors du contraste de température.
Le séchage
Tout comme une céramique classique, la pièce doit sécher lentement à l’abri des courants d’air et des chaleurs extrêmes.
Le polissage
Il est possible de polir sa pièce pour lui donner une surface lisse. On poli généralement avec une agathe.
La cuisson du biscuit
En général, on réalise une première cuisson du biscuit. La pièce est ainsi moins poreuse pour la pose de l’émail, et plus résistante pour la cuisson finale.
L’engobe
Pour certains types de Raku, tel que le Raku nu, nous posons au préalable un engobe. Tu trouveras un peu plus bas une recette d’engobe.
L’émail
Après la cuisson du biscuit, on pose un émail destiné au Raku. Il faut savoir que les parties émaillées resteront blanches et celles non émaillées noirciront. On peut graver des motifs dans l’émail à l’aide d’une pique pour les faire apparaître après cuisson.
La cuisson
La cuisson est rapide et basse température. On sort les pièces alors que le four est incandescent à l’aide de pinces.
L’enfumage
La dernière étape est de récupérer les pièces alors que le four est encore chaud pour plonger les pièces dans des combustibles.L’apport d’oxygène est alors limité. Cette phase est la réaction d’oxydoréduction au cours de laquelle apparaissent les couleurs plus ou moins métallisées, les craquelures ainsi que l’effet d’enfumage. Ainsi, si tu laisses ta pièces quelques minutes à l’air ou si tu la mets directement dans un combustible, les couleurs varieront.
Le nettoyage
Lorsque tu sors ta pièce de l’enfumage, celle-ci sera toute noire ! Après refroidissement, nettoie les pièces avec un produit abrasif, à sec ou à l’eau pour enlever tous les résidus de suie et de cendre.
Le matériel pour le Raku
La terre
La terre doit résister aux chocs thermiques imposés par le Raku. Elle doit être chamottée car la chamotte rend la terre plus résistante. La terre K129, par exemple, est très bien pour le Raku.
Les terres à Raku sont des terres à grès et non des faïences, car les faïences résistent beaucoup moins aux contrastes de température.
L’émail et l’engobe
Tout comme pour la céramique traditionnelle, nous pouvons émailler de différentes manières : trempage, louche, pistolet.
Tu peux utiliser des émaux tout prêts destinés au Raku ou les réaliser toi-même. Pour cela, des frittes sont nécessaires pour créer ces craquelures. Tu peux aussi ajouter à ton émail des oxydes métalliques, des colorants de masse ou des matières minérales.
De magnifiques effets sont obtenus avec des oxydes métalliques lors de la phase d’enfumage. N’hésite pas à expérimenter ces couleurs.
L’engobe utilisé pour le Raku nu doit être très réfractaire afin qu’il se décolle facilement. Alistair Danhieux utilise un engobe composé de 60% Kaolin, 40% silice. Il faut que l’engobe reste friable et poudreux à basse température.
L’ enfumage
Avant tout, il te faut un contenant pour mettre le combustible de l’enfumage.
Pour l’enfumage, tu peux utiliser des copeaux de bois, du papier journal, de la paille, des feuilles, du crin de cheval. La liste est sans fin !
On peut jouer sur la densité de l’enfumage en fonction de la quantité de combustible utilisée ainsi que la durée pendant laquelle on enfume la pièce.
Une fois l’enfumage réalisé, il faut ensuite le stopper en trempant ta pièce dans de l’eau ou en choisissant un combustible qui se consume vite.
Pense que chaque carburant va donner des nuances de teinte qui dureront plus ou moins longtemps. Choisis ainsi ton combustible en fonction de la durabilité de la teinte en fonction des années.
La sonde pyrométrique
Le pyromètre permet d’avoir une montée en température homogène et de rectifier si besoin en ouvrant ou en fermant les trappes d’arrivée d’air du four.
Les pinces
Les pinces sont primordiales pour récupérer les pièces dans le four. Il faut des pinces longues afin de s’approcher le moins possible du four. Les pinces spéciales Raku sont parfaites !
Des seaux d’eau
Si tu souhaites tremper ta pièce dans l’eau pour stopper le phénomène d’enfumage.
La cuisson
Courbe de cuisson
Il y a tout d’abord la cuisson du biscuit, aux environs de 1000°C en fonction de la terre utilisée. Il y a enfin la cuisson finale, celle du Raku.
La cuisson Raku est rapide et prend une quinzaine de minutes pour arriver au point quartz, 573°C. Une fois le point quartz dépassé, on peut monter au maximum de la vitesse pour arriver à la température maximale.
Attention, si tu viens d’engober les pièces, monte doucement jusqu’au point quartz afin que l’engobe ne se décolle pas trop rapidement.
Pour vérifier la température, les céramistes utilisent une sonde. Avec l’expérience, ils voient qu’ils sont arrivés à la température adéquate en regardant par les aération pour détecter quand l’émail qui brille.
Attention, Il ne faut pas monter à trop haute température. En général la cuisson se passe entre 820°C et 1000°C.
Placer les pièces
Lorsque tu places tes pièces dans le four, pense à les espacer afin de pouvoir les attraper facilement avec ta pince !
Se protéger
Le Raku impose une proximité avec les pièces incandescentes et la haute chaleur du four. Les protections que l’on porte sont donc indispensables !
- Cheveux
Toujours avoir les cheveux attachés.
- Chaussures
Il faut porter des chaussures stables comme des tennis.
- Vêtements
Privilégier des vêtements en coton.
- Gants
Les gants sont indispensables pour le Raku. Prends des gants en cuir qui protègent bien les avants-bras.
- Un masque à cartouche
Si tu souhaites te protéger des fumées du Raku, opte pour un masque à cartouches. Tu peux aussi choisir de ne pas en porter et de te placer de telle façon que le vent emporte ces fumées loin de toi.
Le Four Raku
Nous pourrions utiliser tous types de four, cependant certains sont plus adaptés.
- Four en fibres
Privilégie un four en fibre qui montera plus vite en température qu’un four en brique.
- Four à bois ou à gaz
Sur un four électrique, les résistances ne vont pas tenir dans la durée à cause du contraste de température. Il vaut mieux privilégier le gaz ou le bois.
- Se fabriquer son four Raku
Si tu es bricoleuse ou bricoleur, tu peux te fabriquer simplement ton four Raku. Il y a un tas de tutos sur internet ou tu peux même suivre des stages Raku où le céramiste t’enseignera comment procéder. Tu peux aussi acheter des kits tout prêts et te le monter toi-même.
- Acheter un four Raku
Un four Raku est beaucoup moins cher qu’un four traditionnel. Tu peux en acheter neuf ou d’occasion, à toi de voir en fonction de ton budget et des opportunités qui se présentent !
Pour conclure, la technique du Raku est une technique conviviale qui se pratique souvent à plusieurs et accessible car elle ne demande pas de four onéreux. A toi de te lancer ou de chercher près de chez toi si des céramistes ne proposent pas des cuissons sur ce thème !