Tous les jeudis j’accueille en live des artistes, céramistes, toujours en lien avec la poterie. Le but est de vous faire découvrir leur parcours, leurs créations, leurs ambitions. Ces lives sont une source d’inspiration pour tous les amateurs d’argile que l’on soit apprentis céramistes ou céramistes confirmés. Ici, Julie Marques Pichon va nous partager son travail autour des luminaires en céramique et de la lumière !
Après son diplôme en design graphique, Julie a travaillé en freelance avant de se tourner vers le travail de la matière, et notamment du grès. Son engagement envers une démarche éco-responsable l’a conduite vers la création de pièces uniques, allant des mobiliers, aux luminaires, en passant par l’art de la table. Inspirée par les paysages de son enfance tels que les marais salants, les plages de sable et la mer, Julie conçoit des pièces avec des formes organiques et des textures brutes. Tu peux la retrouver sur ses réseaux via @jmp-ceramique et sur son site jmpceramique.com.
Interview de Julie Marques Pichon
Peux-tu nous parler de toi, de ton parcours dans la céramique ?
J’ai un peu commencé par hasard, ce n’était pas une passion d’enfance. A un moment de ma vie j’ai eu besoin de faire quelque chose de manuel. À la base, j’ai suivi une formation en design graphique. Je suis restée dans ce parcours pendant 5 ans. Puis un jour, je me suis réveillée et je n’avais plus envie de continuer dans le graphisme. Il fallait que je trouve quelque chose de manuel. La céramique, c’est venu comme ça ! Ça commençait déjà à être à la mode en 2019. C’est à ce moment-là que je me suis posée la question : pourquoi pas ? J’ai réussi à avoir le chômage, ce qui m’a permis de me former toute seule, sans pression financière, pendant 1 an. Je n’ai pas suivi de formation CAP. J’ai acheté un tour de potier et me suis installée dans l’atelier de mon copain, qui est peintre. J’ai regardé beaucoup de vidéos, je me suis beaucoup entraînée.
J’avais un tour vraiment pas terrible au début qui venait d’Amazon, mais je ne voulais pas investir ne sachant pas si ça allait me passionner et en faire mon métier ! Je me suis laissée 1 an pour voir et finalement, j’ai adoré de suite ! En parallèle des vidéos, j’ai fait une formation avec la céramiste Camille Maisonneuve. Elle a pu rectifier certains gestes. C’est vraiment devenu une passion pour moi !
Comment définirais-tu ton travail pour ceux qui ne te connaissent pas ?
Je dirais que c’est organique ! Même si j’ai commencé au tour, que je voulais absolument savoir faire des mugs, je ne fais que des assiettes et des lampes. 80% du temps, je fais du modelage. Je trouve chouette d’avoir des imperfections dans la céramique. Mon travail est assez neutre notamment au niveau des couleurs . J’ai décidé de travailler quasiment que les couleurs naturelles des terres et particulièrement le grès blanc. C’est vraiment dans les textures et les formes qu’on peut reconnaître mon travail.
Aujourd’hui, à quoi ressemble ton atelier ?
Comme je suis à Paris et seule, il est petit. J’aimerais avoir les moyens d’avoir un grand atelier ! Mon atelier fait 25 mètres carrés et il est clairement dédié au modelage ! Comme je suis seule, je m’étale beaucoup … J’ai une vitrine, c’était important pour moi de pouvoir voir l’extérieur, mais je baisse souvent les stores pour être tranquille.
Aujourd’hui, tu as deux spécialités : le travail avec les restaurateurs et les luminaires céramique. Comment as-tu décidé de te nicher ?
C’est venu par hasard ! À la base, je voulais être céramiste pour vendre directement aux particuliers. Je voulais travailler la vaisselle, car j’aime beaucoup l’art de la table. En débutant, je n’avais aucun réseau, aucun client, je connaissais très peu de céramistes. Je ne suis pas très douée et assidue avec les réseaux sociaux. J’ai donc commencé à donner des cours pour avoir une stabilité financière. Et un jour, j’ai reçu un mail d’une boîte d’événementiel dans le domaine culinaire. Ils voulaient de très nombreuses tasses en seulement 15 jours. C’était très dur, je dormais peu, mais je l’ai fait. Finalement, ce pari a débouché sur d’autres contrats avec des restaurateurs !
J’ai fini par partir dans ce parcours entre pros. Les contrats sont plus gros, c’est plus facile pour payer mon loyer ! En plus, je suis assez réservée, j’ai du mal à être directement en face des gens avec les marchés de potiers. Ce travail avec les restaurateurs me correspond. J’adore voir mes pièces dans les restaurants !
Les luminaires céramique sont venus contrebalancer la production en série. Je voulais quand même proposer des pièces uniques. J’adore le travail autour de la lumière : c’est utile et en même temps décoratif. J’ai vraiment l’impression que tout ce que j’ai commencé est arrivé par hasard et par chance. Maintenant, depuis quelques mois, j’essaie de développer davantage la partie luminaires céramique car je crois que c’est ce que j’aime le plus.
Faut-il suivre une formation pour vendre des luminaires céramique ?
Oui, il existe une formation qui dure 2 jours permettant d’avoir des luminaires qui répondent au normes CE. Par contre, je n’en ai pas trouvé sur Paris, mais il y en a à Vannes, en Bretagne, et une à La Rochelle via la Chambre de Métiers de l’Artisanat. C’est une formation qui te permet de pouvoir certifier toi-même ton assemblage. Même si tu ne fabriques pas une bombe, c’est important de l’avoir car ça reste de l’électrique. Ce certificat fait partie de la loi. Tu es obligé de l’avoir pour assembler toi-même.
Il y a d’autres options. Moi je sous-traite le montage à d’autres ateliers certifiés ou alors j’achète des packs où tout est déjà monté. Par exemple, je me fournis au Bazar d’Électricité. C’est l’option rapide mais pas personnalisée … Donc le mieux reste de faire sous-traiter par des électriciens, par exemple. Ce n’est pas si cher que ça (entre 20 et 30€). Je préfère acheter en boutique physique les packs pour être sûr qu’ils soient aux normes.
Au niveau des terres que tu utilises, as-tu des conseils à apporter pour fabriquer des luminaires céramique ?
Moi, j’utilise que du grès car j’ai peur dans mon atelier de mélanger les pains de terre. La porcelaine, c’est super pour les luminaires, car c’est plus translucide. Pour laisser passer la lumière, avec le grès, j’ai fait le choix de faire des globes ou des ampoules. Le pied peut donc être dans n’importe quelles matières. Ce sont les seules solutions pour que la lumière passe bien. La porcelaine est peut-être la meilleure terre pour les luminaires, mais je n’aime pas l’esthétique. Et la faïence, pourquoi pas, bien que ce soit plus fragile !
Pour les accroches, les appliques, il y a des difficultés de conception ? Faut-il coller ou rajouter des éléments ?
Moi, je ne colle rien ! Tout est fait en un seul bloc vu que c’est du modelage. Je fais un système de plaque en terre que je monte petit à petit. Les difficultés, sont la rétractation de la terre pendant la cuisson et la déformation du trou pour caler la douille. Il faut calculer la rétractation, mais sinon, je n’ajoute rien. On peut faire tellement de choses avec la terre sans avoir à ajouter autre chose.
Un faux plafond supporte t-il le poids des suspensions ?
Ça dépendra du poids de la pièce ! Moi, j’essaie de faire des plaques très, très fines pour avoir le moins de poids possible. Un système basique peut supporter jusqu’à 3 kg. Je pense par contre à l’artiste céramiste Olivia Cognet qui fait des choses énormes et magnifiques. Elle m’a beaucoup inspirée. Ses œuvres sont immenses. Dans ce cas, pense qu’un faux plafond ne supporterait pas !
Tu viens d’une reconversion, t’es-tu parfois posé la question de repartir vers autre chose ?
La céramique a été une évidence. Même si c’est très dur, je travaille beaucoup d’heures par semaine. J’ai du mal à déléguer, je n’ai pas les moyens de prendre une assistante. Il y a certes des contraintes, mais elles sont tellement minces à côté de ce que ça me procure. J’aime ce que je fais ! De toute façon, peu importe ce qu’on veut créer, il y a toujours des difficultés.
Aujourd’hui, vis-tu de la céramique ?
Oui ! J’en vis et ça a été assez rapide car je donnais beaucoup de cours à l’époque, soit 3 par semaine. Ce sont vraiment les cours qui m’ont payée au début. Je pense qu’on peut réussir à en vivre, ça ne veut pas dire vivre convenablement. Après, ça dépend aussi de ce dont les gens ont besoin. Moi, je n’ai pas besoin de gagner beaucoup pour être contente ! En tout cas, je pense que donner des cours peut vraiment aider au début pour s’en sortir !
Est-ce que tu émailles tes pièces ou tu les laisses brutes ?
Alors pour les lampes, je ne les émaille pas ! Ça peut arriver que je le fasse, mais seulement à la commande. Je ne les émaille pas car j’ai envie que le décor reste le plus neutre possible.
Peux-tu nous citer deux céramistes qui t’inspirent le plus?
Alors, je dirais Olivia Cognet comme dit tout à l’heure. Je la trouve super via les réseaux et j’admire beaucoup son travail. Et sinon, il y a une céramiste américaine Kelsie Rudolph, qui travaille avec le colombin. C’est certes plus coloré que moi mais j’aime bien son travail !