Qu’il crée des poteries ou des sculptures, le céramiste travaille toujours à partir de la même matière première : l’argile. Mais un atelier de céramique contient souvent plusieurs types d’argiles, chacun ayant son utilité, chacun jouant son rôle dans une des nombreuses étapes permettant la création d’une pièce.
Cet article fait partie du dossier « Argiles » qui regroupe 8 articles :
1 – Les argiles en céramique
2 – Choisir son argile en poterie ou sculpture
3 – Le Guide de la porcelaine pour céramiste (à venir)
4 – Le Guide du grès pour céramiste (à venir)
5 – Le Guide de la faïence pour céramiste (à venir)
6 – L’ argile autodurcissante ou argile sans cuisson
7 – Quelle est la température idéale de cuisson d’une argile ?
8 – Tester les propriétés d’une argile
Sommaire
- Avant tout, qu’est ce que l’argile ?
- Le kaolin
- Les ball-clays ou argiles plastiques
- Les pâtes céramiques
- Les argiles réfractaires
- La bentonite
Avant tout, qu’est ce que l’argile ?
Les découvertes archéologiques montrent la présence de poteries dans toutes les civilisations, de l’ Amérique précolombienne à l’Orient. Ceci s’explique facilement : l’argile qui les constitue se trouve à peu près partout dans le Monde ! Et sa faculté à former avec l’eau une pâte homogène et plastique fascine l’humanité depuis la Préhistoire.
A sa naissance par refroidissement, la croûte terrestre a formée des roches, en majorité des feldspaths. Cette croûte est constituée à plus de 90% par 3 minéraux : la silice, l’alumine et le fer. Les 10% restant étant des métaux alcalins : sodium, potassium, calcium, magnésium.
Depuis des millions d’années, ces roches ont été attaquées et partiellement dissoutes par les intempéries et principalement l’eau. Les cours d’eau ont ainsi transporté jusqu’aux océans des particules de ces différents minéraux qui ont pu se déposer par couches dans certaines zones. Ceux sont les argiles sédimentaires ou argiles secondaires qui contiennent de la silice, de l’alumine, des alcalins, du fer et plus ou moins d’impuretés organiques.
A cause de cette érosion, les roches feldspathiques ont perdues une majorité de leur particules alcalines (sodium, calcium, etc) qui sont plus solubles. Ne reste donc qu’une grosse partie d’alumine et de silice, qui, exposée longuement à l’humidité, va formée une argile plus « pure ». On l’appelle l’argile primaire. C’est le kaolin, rendu célèbre par la porcelaine, mais omniprésent en céramique dans nos pâtes ou nos émaux.
L’argile possède une grande capacité à retenir l’eau, à la restituer et à la réabsorber. Sa malléabilité est due à la structure lamellaire des fines particules d’argile qui glissent les unes sur les autres grâce à la présence d’eau. En séchant elle se raffermit, se rétracte et casse facilement. Il faut la cuire à plus de 600°C pour la durcir définitivement.
Le kaolin
Définition
Le kaolin est une argile formée en grande partie de kaolinite (silice + alumine + eau) et de débris de roches feldspathiques. Comme on l’a vu précédemment, le kaolin est issu de recomposition des roches sur place. C’est donc une argile relativement pure, elle contient très peu de fer, de titane ou autres minéraux. Mais sa composition en grains grossiers la rend très peu plastique. Les kaolins diffèrent par leur composition à travers le monde. Les kaolins les plus blancs après cuisson servent à la fabrication des porcelaines.
Utilisation à l’atelier
Le kaolin a toute sa place dans un atelier de potier. On l’achète à l’état de poudre et il sert à la fabrication d’émaux céramiques, d’engobes et même aux enduits pour protéger les plaques de ton four. Pour les plus expérimentés, il est utile pour modifier ta pâte céramique.
Chez les fournisseurs, tu trouveras 2 types de kaolins, à choisir en fonction de ton utilisation :
- le kaolin « classique » constitué d’environ 50 % de silice et 35 % d’alumine avec plus de 10% de perte au feu. Ce kaolin contient des molécules d’eau liées chimiquement qui disparaîtront à 600°C.
- le kaolin calciné ou molochite constitué d’environ 50% de silice et 45% d’alumine. Ce kaolin a déjà été cuit à 600°C puis réduit à l’état de poudre. Il a l’avantage principal de ne pas causer de retrait au séchage.
Les ball-clays ou argiles plastiques
Définition
Les ball-clays sont des argiles secondaires aux propriétés différentes du kaolin bien que leurs compositions soient proches. Les particules des ball-clays sont plus beaucoup fines du fait de leur voyage dans l’eau, ce qui leur donne une grande plasticité. Elles contiennent également plus d’impuretés (fer, titane, alcalins) ce qui les rend plus fusibles et plus colorées.
Les ball-clays et le kaolin sont les constituants principaux des pâtes céramiques que l’on abordera juste après.
Utilisation à l’atelier
On peut trouver des sac de ball-clay en poudre dans certains atelier de céramiste mais c’est plutôt rare car on les utilise dans des domaines assez pointus comme la modification des propriétés d’une pâte céramique ou d’une barbotine de coulage pour augmenter leur plasticité. La finesse de leurs particules en font aussi une matière très utile pour la technique de la terre sigillée ou pour confectionner des émaux ou engobes.
Les pâtes céramiques
Les céramistes travaillent l’argile mais, en réalité, il s’agit de pâtes céramiques. Les pâtes céramiques sont des mélanges d’argiles et de matières minérales dont la composition est étudiée pour obtenir des propriétés particulières.
La température de cuisson et la porosité des pâtes céramiques déterminent leur classement en 3 grandes familles :
- la faïence
- le grès
- la porcelaine
La faïence
La faïence est bon marché et adaptée à un large éventail de techniques. La température requise pour cuire le biscuit varie aux environs de 1050°C. C’est une pâte céramique basse température. Après la cuisson, la faïence reste tendre et poreuse. C’est très bien pour l’humidité des pots de fleurs mais pas terrible face au gel. Elle doit être émaillée pour devenir imperméable, l’émail viendra se déposer contre le tesson et ne fera pas corps avec la terre car la faïence ne rentre pas en fusion. La deuxième cuisson doit être réalisée aux environs de 980°C (cela dépendra de la température de cuisson indiquée sur votre émail / glaçure). A la différence du grès, la température du biscuit est supérieure à la température de la cuisson finale, cela permet de dégazer la terre.
Le grès
C’est une pâte céramique haute température et également bon marché. Le grès est un matériau résistant aux éraflures et imperméable à l’eau si suffisamment cuit. C’est une terre idéale pour la céramique utilitaire et extérieure car il résiste au gel et est imperméable. La température requise pour cuire le biscuit est aux environ de 980°C. La cuisson finale, quant à elle, se trouvera entre 1200° et 1300°C. Nous ne sommes pas obligés d’émailler le grès si sa cuisson a éliminé toute porosité. L’émail et le grès font corps, car à haute température le grès entre en fusion. Le grès gardera plus de traces de déformations que la faïence lors de la cuisson : toutes les petites imperfections du tournage ressortiront plus facilement. Après cuisson, ses couleurs seront plus ternes que pour la faïence.
La porcelaine
Grâce à la présence de kaolin, la porcelaine est d’une grande pureté et d’une remarquable blancheur. Cuite entre 1300° et 1400°C, elle devient translucide et imperméable. Les émaux y développent toute leur richesse et l’intensité de leurs couleurs. C’est une pâte céramique haute température très plastique (donc difficile à tourner) et chère. Tout comme pour le grès, la porcelaine et l’émail feront corps, c’est à dire qu’ils entreront en fusion à la température de cuisson finale.
L’argile autodurcissante
C’est une argile fine, sans chamotte à laquelle on ajoute un produit durcisseur. Le produit durcisseur entre en action lors du séchage et produit un effet analogue à celui d’une cuisson. Mais attention au contact de l’eau ! L’argile autodurcissante se désagrège à nouveau, sauf cuisson à température traditionnelle ! Son coût est 2 à 5 fois plus élevé que celui de l’argile traditionnelle. Elle se limite donc à des objets décoratifs.
Pour en savoir plus sur cette pâte un peu particulière, n’hésite pas à consulter mon article complet sur l‘argile autodurcissante ou visionne cette vidéo.
La terre papier ou paperclay
C’est une argile à laquelle on ajoute du papier. Elle se modèle avec une grande liberté car elle est moins sujette aux fissures. On la cuit à la température de l’argile de base utilisée dans la préparation. Cependant, la durée de conservation du paperclay est limitée : l’apparition d’odeurs ou de tâches est un signe de dégradation de la cellulose.
Les argiles réfractaires
Définition
Les argiles réfractaires résistent à la chaleur. Cette famille englobe une grande variété d’argiles ayant comme seule propriété commune de ne pas se déformer à 1500°C. Elles sont utilisées pour fabriquer des plats de cuisine, des briques ou autres éléments exposés à de haute températures. Elles sont généralement utilisées comme composants pour augmenter la résistance à la chaleur d’une pâte céramique et lui donner du grain.
Les pâtes contenant ces argiles réfractaires sont confectionnées pour des utilisations précises :
- Les terres à feu sont des argiles qui pourront être exposées directement aux flammes.
- Les terres à creuset servent à confectionner des plats réfractaires pour hautes températures.
Utilisation à l’atelier
On n’utilise pas d’argile réfractaire en tant que telle à l’atelier. Par contre, certains céramistes vont utiliser des terres à creuset pour confectionner des plats pour cuire leurs résidus d’émaux ou tester la fusibilité de pâtes céramiques.
Les terres réfractaires ont aussi trouvé un certains succès auprès des sculpteurs qui exploitent leur texture particulière dans leur création.
La bentonite
Définition
La bentonite est une argile d’origine volcanique. Sa propriété principale est sa capacité à retenir l’eau. Elle ne peux être utilisée seule mais apporte une grande plasticité aux pâtes à laquelle on la mélange.
Utilisation à l’atelier
La bentonite peut servir aux céramistes expérimentés pour modifier leurs pâtes céramiques.
Elle est plus souvent utilisée comme agent suspensif dans les bains d’émaux. La rétention d’eau permet d’augmenter la viscosité d’un émail liquide, rendant ce dernier plus homogène.
Nous avons vu les principaux argiles utilisés par les céramistes. Si tu cherches des renseignements plus précis sur les pâtes céramiques ( faïence, grès, porcelaine ), je t’invite à consulter les articles de notre dossier « Argiles » qui explorent ce sujet en profondeur.
N’hésite pas à poser des questions en commentaire. Bonne journée ! 🙂